Le glaucome
Le glaucome est une pathologie oculaire chronique caractérisée par
une augmentation de la pression intraoculaire, qui entraîne
un endommagement progressif du nerf optique.
Cette condition peut mener à une réduction du champ visuel et,
dans les cas extrêmes, à la cécité complète.
Qu'est-ce que le glaucome ?
Plusieurs types de glaucomes existent, notamment le glaucome à angle ouvert et le glaucome à angle fermé, chacun ayant des implications diagnostiques et thérapeutiques différentes.
Le glaucome chronique à angle ouvert, encore appelé glaucome primitif à angle ouvert (GPAO), en est la forme la plus fréquente. Les symptômes courants comprennent une perte graduelle de la vision périphérique, une sensibilité à la lumière, une vision nocturne réduite et, dans des cas avancés, une perte significative de la vision centrale.
Le Glaucome en chiffres
Le glaucome est la deuxième cause de cécité légale chez l’adulte dans le monde après la cataracte, et la deuxième après la dégénérescence maculaire liée à l’âge dans les pays développés.
Les glaucomes touchent un peu moins de un million de personnes en France et 80 millions de personnes dans le monde, dont la moitié qui s’ignore, faute de dépistage. Ces chiffres sont à multiplier par 3 ou 4 au sein d’une population noire.
Les principaux facteurs de risque sont
- La tension oculaire augmentée (HTO) est le principal facteur de risque. L’HTO est liée à une difficulté à l’évacuation de l’humeur aqueuse contenue dans la chambre antérieure. Cette difficulté est le plus souvent du à une résistance exercée essentiellement au niveau de l’angle irido-cornéen, précisément au niveau du trabéculum qui est le siège d’une sclérose progressive.
- Les antécédents familiaux, fréquents (20 à 30%).
- L’origine ethnique : chez les sujets mélanodermes, il y est plus précoce, plus sévère, et plus difficile à traiter.
- La myopie multiplie le risque par trois.
- Les facteurs vasculaires tels que la migraine ou l’hypotension artérielle.
- La prise de corticoïdes par voie générale ou locale.
Quels sont les symptômes d'un glaucome ?
Le GPAO est une pathologie totalement asymptomatique, sauf en cas d’atteinte importante du champ visuel.
La circonstance de découverte la plus fréquente est encore fortuite, à l’occasion d’une mesure systématique de la tension oculaire lors d’une consultation de routine.
Comment fait-on le diagnostic d'un glaucome ?
Le diagnostic est fait sur un ensemble d’arguments : niveau de la pression oculaire, atteinte du nerf optique et du champ visuel…
L’acuité visuelle est conservée jusqu’à un stade ultime.
L’hypertonie oculaire se définit par une valeur de PIO supérieure à 21 mmHg. Mais une valeur de PIO chez un même sujet doit toujours être confrontée à l’épaisseur cornéenne centrale (pachymétrie) et interprétée en fonction de l’heure.
La gonioscopie (ou examen de l’angle entre l’iris et la cornée) sert à évaluer le degré d’ouverture de cet angle où s’écoule l’humeur aqueuse, à l’aide d’un verre posé sur la cornée sous anesthésie topique.
Les différentes structures de l’angle sont identifiées : d’arrière en avant: la bande ciliaire, l’éperon scléral, le trabéculum et l’anneau de Schwalbe (figure2). Le degré de pigmentation de l’angle et le caractère convexe, plan ou concave de l’iris sont appréciés.
L’angle irido-cornéen peut être analysé aujourd’hui par des techniques d’imagerie tels que l’OCT (tomographie à cohérence optique) ou l’UBM (échographie haute fréquence) avec une bonne corrélation gonioscopie-imagerie.
La papille ou disque optique ou tête du nerf optique est la réunion des fibres qui vont former le nerf optique. L’analyse du disque optique s’effectue à l’aide d’une lentille au fond d’œil.
L’excavation papillaire est la dépression observée au sein du disque optique, cet espace laissé libre par la disparition des fibres optiques. Pour l’apprécier, on retient le rapport excavation/disque « cup/disk », rapport entre la taille de l’excavation et celle du disque optique.
L’excavation papillaire est le reflet clinique de la perte en fibres optiques, et donc du stade évolutif du glaucome.
L'examen des fibres optiques : l'atteinte structurale du nerf optique
Divers procédés peuvent objectiver des altérations structurales du disque optique et des fibres visuelles :
- Les photographies du fond d’œil sont utiles pour montrer des déficits qualitatifs.
D’autres techniques ont été développées pour quantifier les mêmes déficits : à ce jour trois types d’analyseurs automatisés sont disponibles : - La tomographie à cohérence optique (OCT) fournit des plans de coupe autour de l’axe de la papille pour évaluer l’épaisseur et le volume du disque et de la couche des fibres.
- L’ophtalmoscopie laser confocale (HRT) réalise des coupes frontales successives de la papille pour une reconstruction dans l’espace de l’excavation.
- La polarimétrie à balayage laser (GDX) permet de mesurer l’épaisseur des fibres optiques péri-papillaires par quadrant horaire.
Quelles sont les différentes formes cliniques du glaucome à angle ouvert ?
Il s’agit d’une variante du glaucome chronique à angle ouvert représentant environ 1 % des glaucomes en Occident et survient chez le sujet jeune myope. Il provient de l’érosion de la face postérieure de l’iris sur le cristallin et ses fibres entrainant une dispersion de pigment dans l’œil.
Il représente également une variante du glaucome primitif à angle ouvert. Il est provoqué par la dispersion dans l’oeil d’un matériel fabriqué par le corps ciliaire. Il survient chez les sujets âgés de plus de 70 ans. Une cataracte y est souvent associée.
C’est un diagnostic posé devant une papille excavée ou devant des déficits du cham visuel, donc au stade d’atteinte du nerf optique. La PIO reste dans les normes statistiques. Il est souvent retrouvé chez des sujets de plus de 60 ans présentant un terrain vasculaire.
Quels sont les autres glaucomes ?
Ils représentent 15 à 20 % des glaucomes. Il s’agit soit de glaucomes secondaires à angle ouvert par obstacle trabéculaire (glaucomes cortisonique ou post-traumatique) et les glaucomes secondaires par fermeture de l’angle où l’obstacle (glaucomes uvéitique, phacomorphique (par gonflement cristallinien et néovasculaire).
Si la forme aiguë est aisément reconnue par sa symptomatologie bruyante, la forme chronique causée par des crises subaiguës spontanément résolutives est certainement sous-estimée.
Quelle est l'évolution et le pronostic du glaucome à angle ouvert ?
L’évolution du glaucome est chronique et silencieuse. Les lésions du nerf optique sont à ce jour irréversibles.
En l’absence de traitement, le glaucome progresse et entraîne une amputation du champ visuel de la périphérie vers le centre. Traité efficacement, l'évolution peut être stabilisée, mais en aucun cas le glaucome ne doit être considéré comme guéri.
La fréquence de suivi d’un glaucome chronique est biannuelle.
Les différentes options de traitement
Les options thérapeutiques pour le glaucome sont nombreuses et sont adaptées à chaque type, stade de glaucome et à chaque patient.
Ce sont les collyres hypotonisants antiglaucomateux qui agissent en augmentant l’écoulement d’humeur aqueuse (dérivés des prostaglandines et prostamides parasympathomimétiques (drogues cholinergiques ou myotiques) ou en diminuant la production d’humeur aqueuse (Béta-bloquants, inhibiteurs de l’anhydrase carbonique) ou par un mécanisme mixte.
La trabéculoplastie sélective (ou trabéculorétraction) consistant à engendrer des brûlures punctiformes au niveau du trabéculum de manière à augmenter l’écoulement de l’humeur aqueuse. Elle utilise un laser spécifique appelé laser SLT.
Le taux de réussite de cette technique a été estimé à 50 % à 5 ans puis diminue de 10 % par an.
Le cyclo-affaiblissement trans-scléral au laser diode vise à détruire les corps ciliaires et diminuer ainsi la production d’humeur aqueuse. Soixante pour cent de bons résultats s’observent à 1 an avec cependant un retraitement nécessaire dans la moitié des cas.
Plusieurs techniques chirurgicales existent pour faire baisser la Pression intra-oculaire et réduire ainsi l'évolution du Glaucome. Les techniques historiques de référence sont:
- La chirurgie filtrante pénétrante ou trabéculectomie qui consiste à créer une fistule entre la chambre antérieure et les espaces sous-conjonctivaux, par la résection, sous un volet scléral, d’une portion du trabéculum,
- La chirurgie filtrante non perforante ou sclérectomie profonde qui revient à réséquer uniquement le mur interne du canal de Schlemm où s’exerce la résistance à l’excrétion de l’humeur aqueuse, sous un volet scléral.
Ces 2 techniques sont réalisées au bloc opératoire sous anesthésie locale. Un suivi post-opératoire de plusieurs semaines est nécessaire.
Ces dernières années, plusieurs techniques moins invasives, dites MIGS (Minimally Invasiv Glaucoma Surgery) se sont développées. Leur principe pour abaisser la PIO est de créer une dérivation de l’humeur aqueuse à partir de la chambre antérieure vers un espace externe selon 3 voies sont possibles :
- Le canal de Schlemm
- L’espace supra-choroidien
- L’espace sous-conjonctival
Certains sont utilisés déjà massivement d’autres moins. L’autorisation d’utilisation diffère selon les pays et seulement certains sont disponibles en France.
L’efficacité des drains MIGS est prouvée chez les glaucomes débutants, pour des niveaux de PIO cibles modérés, et donc parfaitement adapté pour les glaucomateux dès le début de l’atteinte en combinaison avec la chirurgie de la cataracte. Elle potentialise l’effet de l’extraction du cristallin sur la PIO. Combiner chirurgie de la cataracte et pose de drain fait sens car le glaucome et la cataracte coexistent fréquemment chez les mêmes patients.
Avec les drains ab-externo, les 2 pathologies peuvent être traitées dans le même temps opératoire, en utilisant la même incision et le même mode d’anesthésie. La réalisation de telles chirurgies combinées permet d’améliorer à la fois la vision, la PIO et la qualité de vie mais également d’éviter ou de retarder une chirurgie invasive du glaucome ultérieure. L’arrivée des drains permet également d’envisager des chirurgies chez des patients pour lesquels le risque de perte de vision liée au glaucome ne justifiait pas le risque associé aux chirurgies traditionnelles.
Les dispositifs actuellement utilisés en France sont : l'I-Stent (Glaukos), le XEN (Allergan-Abbvie) et le Preserflo (Santen).
La séquence du geste chirurgical de pose du drain (avant/après) dépendra du dispositif et de l’expérience du chirurgien.
Le Docteur Alice GRISE-DULAC est spécialiste de la chirurgie Mini-Invasive du Glaucome et a été un des premiers chirurgiens à réaliser ce type d'intervention en France avec l'arrivée des premiers MIGS (I-Stent). De nombreuses innovations sont en cours de développement pour traiter encore plus efficacement et avec le moins d’effets secondaires le glaucome.
Ces interventions nécessitent un plateau technique spécialisé et sont réalisées par le Docteur GRISE-DULAC à l'Hopital-Fondation Adolphe de Rothschild ou à la Clinique Geoffroy Saint Hilaire selon les indications.
Les indications de ces traitements
Le schéma thérapeutique traditionnel privilégie en première intention les traitements médicaux. Les collyres à base de prostaglandines sont à ce jour le traitement de première intention, suivis de près par les Béta-bloquants. Une monothérapie est toujours privilégiée mais les collyres peuvent au besoin s’associer entre eux sous la forme d’une association, d’une bithérapie, ou d’une trithérapie.
Le laser a des indications bien définies : la trabéculoplastie est à réserver au traitement des glaucomes exfoliatif et pigmentaire et la cyclodestruction à celui des glaucomes réfractaires.
L’indication opératoire se pose traditionnellement en cas d’échec du traitement médical.
Il n’y a pas de conduite stéréotypée dans le traitement des glaucomes. Chaque patient doit être considéré au cas par cas en fonction des facteurs de risque, du niveau pressionnel, de l’excavation glaucomateuse et des altérations du champ visuel.